jeudi 16 octobre 2008

L’énergie éolienne en Tunisie : du vent et de l’énergie humaine

Les villageois de Sidi Daoud ne se sentent pas beaucoup concerner par les éoliennes qui se trouvent en haut du mont à un kilomètre et demi loin de leur village. "Ce ne sont que des machines qui ne font pas vivre les jeunes du bled" explique un villageoi.
Entre les champs de vigne, et les oliviers la route qui mène à Sidi daoud. De loin sur un mont on voit presque tout le village: des terres vertes d'agriculteur, la mer et des éoliennes qui tournent. Effectivement le village est connu par la production du vin, la production du thon et la production de l'énergie électrique.

Omar Ben Younes et Mohamed Sghair, comme la quasi-majorité du villageois de Sidi Daoud vivent de la mer, ce sont deux jeunes pêcheurs qui n'ont jamais sortie de leur petit village sauf pour pêcher ou pour aller à Tunis, la capitale, pour faire quelques courses. Pour eux, Ces éoliennes sont là depuis quelques années, ils en ont eu l'habitude de voir. «La nuit, de la mer c'est très beaux à voir» Lance Omar .«Pas du tout c'est pas beau, et ils font beaucoup de bruit, je n'aime pas, je trouve le ventilateur du bateau beaucoup plus beau» lui répond Mohamed avec son visage naïve.
Des machines qui tournent et elles ne s'arrêtent qu'en cas de temps très calme ou trop venteux ce qui n'est presque jamais arrivé.
Pour que les éoliennes tournent, il leurs faut du vent mais aussi des gens qui en consacrent leurs expériences et leurs vies tel que M. Mejri Mohieddine, chef de département Études Énergétiques. Âgé d'une cinquantaine d'année, très silencieux, il a travaillé sur l'énergie éolienne depuis 15 ans « ça fait un bail maintenant».
Après des années de travaille (depuis exactement 1992), le jour J où il a vu les éoliennes tournent c'était « fabuleux, au départ on ne croyait pas trop... L’éolienne n'est pas grande que de taille et en forme» à confié M. Mejri avec son air pensif.

Le parc de Sidi daoud a été lancé au départ avec 32 aérogénérateurs en l'an 2000, en 2003 il y a eu la première extension avec 12 aérogénérateurs. Et en Juin 2008 la deuxième extension avec 26 aérogénérateurs qui ont été implantés mais ils n'ont pas été jusqu'à aujourd'hui mis en service industriel. Toutes ces éoliennes ont été implantées «en gardant l'aspect écologique» rassure M. Abbes Miledi chef d'aménagement d'extension et un nouveau papa d'une petite fille, Aujourd'hui, elle a deux mois.
« Je suis à sidi daoud pour 2 ou 3 ans, je ne travaillerai pas toute ma vie ici, je suis de cette région, mais ce n'est pas la raison pour la quel je travaille sur ce site. C'est le vent qui m'a ramener chez moi mais c'est aussi grâce à lui que je repartirai de nouveau» affirme cet homme à la trentaine, très assoiffés à la recherche et à la nouvelle technologie.
« Un projet c'est comme un bébé, pour moi l'éolienne c'est comme ma petite fille.
Je veille à son évolution et je fais grandir et un jour je repartirai et c'est à son mari de continuer avec elle le chemin. Pour l'éolienne je la confirai aux personnels de la centrale» continue Abes a expliqué.
Le jour où il a vu les éoliennes tourner pour la première fois, était un jour qui n'est pas prés à l'oublier. Cet ingénieur ne trouve pas les mots pour le décrire. Il essai de le faire avec son regard pas trop expressif et ses mains pour dire peut être que c'était grandiose.
Le parc de Sidi Daoud, constitue 2% de la production électrique en Tunisie, avec une puissance de 55MW. Ce petit pourcentage fera gagner la STG 33 000 Tep de combustible et 11 000 m3 d'eau. Il permettra aussi d'éviter annuellement l'émission des rejets atmosphériques dont 93000 T de CO2, 174 Tonnes de NOX, 190 Tonnes de SOX, et 9 Tonnes de particules. Des chiffres qui ne sont pas du tout petit pour les écologistes.

Youad Ben Rejeb

samedi 11 octobre 2008

Centrale éolienne de Sidi Daoud

Tunisie : Impossible de créer un média indépendant

Créer un média indépendant en Tunisie est une gageure bien que rien dans les textes de loi ne l'empêche véritablement. Les seuls médias édités dans le pays sont complaisants ou affichent un caractère apolitique. Les autres sont condamnés aux oubliettes, à l'exil ou doivent se contenter du Web.

La quarantaine, cheveux poivre et sel, Salah Fourti est lassé des beaux discours sur la démocratie ressassés par les représentants de l’État. Au lendemain du changement politique du 7 novembre 1987 qui a vu arriver le président Ben Ali au pouvoir, Salah a été le premier à déposer une demande d'ouverture d'une radio privée, Radio 7. Une trentaine d’autres dossiers ont depuis été présentés à l’administration. Tous sont restés sans suite. Le 10 décembre dernier, journée des droits de l'Homme, Radio 7 a fêté ses 21 ans d’attente. "Nous avons écrit au plus haut responsable de l’État et présenté un recours devant le tribunal", raconte Salah, aujourd’hui fatigué de ce rêve qu’il a nourri pendant de nombreuses années. "L’ensemble de nos recours n’a donné aucune solution. Nous n'avons eu droit qu’à des réponses évasives", continue-t-il. Aujourd’hui, il est pourtant à la tête de l’Association des radios libres, qui regroupe les radios qui n’ont pas été autorisées à émettre.

Pouvoir discrétionnaire

Selon Naji el Bghouri, président du Syndicat national des journalistes (SNJ), "c’est l'une des atteintes à la liberté de presse en Tunisie. Il faut remanier le code de la presse pour assurer la libre initiative dans le secteur des médias". La Constitution ainsi que le code de la presse insistent pourtant sur le fait que l’édition est libre et garantie par la loi. Des conditions préalables particulières ne sont pas posées pour se voir accorder une autorisation. Pour Naziha Rejiba, de l’Observatoire national des médias, qui milite pour la libéralisation du secteur de la presse, "chaque citoyen a le droit d’éditer une publication. Or, ce droit nous est pour le moment dénié. Et tous les recours ont été épuisés pour le faire valoir". "En matière de presse, la Tunisie n’est pas un état de droit, mais de passe-droits. J’attends une autorisation pour une maison d’édition depuis février 2007", déclare Taher Bel Hassine, un homme d’affaire, directeur de la chaîne de télévision Elhiwar (Le dialogue) qui émet de l’étranger. "Les chaînes qui fonctionnent actuellement ont été autorisées par décision présidentielle annoncée à l'occasion d'un 7 novembre [fête d'investiture de Ben Ali, ndlr] quelconque", ajoute-t-il.
Depuis le sommet mondial sur la société de l’information organisé en 2005 à Tunis, le pays s'est trouvé obligé de libéraliser un tant soit peu le secteur des médias. Trois autorisations ont été octroyées à Radio jawhara, MozaïqueFm et Hannibaltv, qui ont en commun d'avoir adopté une ligne pro pouvoir et d'axer leurs programmes sur le divertissement. "La libéralisation des ondes n’était qu’un simulacre. La Tunisie ne pouvait ignorer le mouvement mondial de la liberté d’expression et était obligée de s’y engager, tout en ménageant le monopole de fait sur le secteur. Les autorisations ont été octroyées à des personnes faisant partie directement du cercle familial présidentiel", explique Salah Fourti. Radio Zeitouna (L’olivier), qui vient de faire son apparition, est détenue par le gendre du président Ben Ali.

Poussés à l'exil

Selon le SNJ, la Ligue tunisienne des droits de l'Homme (LTDH) ou le Syndicat des radios libres, plus de 100 demandes d’autorisations de médias de presse écrite, radios et télévision confondues attendent toujours d’être satisfaites. Dans un pays où les publications indépendantes font cruellement défaut, la libéralisation du secteur de la presse constitue un souci majeur pour l’ensemble de la société civile. Selon des organismes comme le SNJ, la LTDH et Amnesty international, les titres indépendants ayant disparu à la suite de pressions diverses exercées sur leurs activités seraient plus nombreux que les titres créés. Devant cette réalité, plusieurs porteurs de projets de médias, las d’attendre ces autorisations ou anticipant un refus éventuel, ont choisi de le lancer à partir de l’étranger. D’autres se sont réfugiés sur internet en attendant une hypothétique ouverture. La Chaîne du Dialogue, qui émet par satellite, est diffusée à partir d’Italie tandis que le magazine Africana est édité en France. La revue Kalima s’est transformée en un webzine mais les autorités ont vite réagi en bloquant l’accès à son contenu à partir de Tunis, sort partagé par Radio 7, lancée sur internet en 2008. D’autres campent sur leurs positions et ne cèdent pas encore à la tentation de l’exil ou du Web, mais demeurent dans l'attente. "Je voulais et je voudrai un magazine en bonne et due forme, imprimé sur papier", affirme Noura Borsali, une journaliste qui attend depuis 17 ans l'autorisation de créer un magazine féminin qui s'appellerait "La maghrébine".

Par Féthi Djebali, Youad Ben Rejeb

samedi 4 octobre 2008

Le Maghreb veut les beurs et l’argent des beurs

Les transferts d’argent continuent de peser lourd sur les balances commerciales des pays du Maghreb et surtout sur leurs réserves en devise. Etats et sociétés de transferts trouvent leurs comptes et cherchent de plus en plus à maintenir cette manne qui renflouent leurs caisses. Ces transferts se trouvent aussi être un puissant outil de réduction de la pauvreté dans ces pays.



Sans papiers à Paris, le mari de Myriam, mère de 3 enfants, envoie fréquemment de l’argent à sa famille. « Mon mari vit en France, mes enfants et moi en Tunisie. Nous ne l'avons pas vu depuis 4 ans.» Confesse elle « Il nous envoie, toutefois, de l'argent, le transfert étant quasi-instantanée».A cause de la question des papiers, le mari de Myriam, se trouve en effet dans l’impossibilité de passer par les réseaux bancaires pour envoyer de l’argent. Des sociétés comme western Union ou Money Gram lui permettent de le faire sans avoir besoin de papiers. Il compte parmi le million d’immigrés qui envoient régulièrement des fonds vers leurs familles.

En la seule année de 2007, le taux de transfert d’argent vers la Tunisie s’est vu augmenter de 8,4% atteignant 848 millions d’euros contre 780 millions d’euros en 2006. Les transferts de l’étranger sont de loin le deuxième pourvoyeur de l’Etat tunisien en devise après le tourisme. Mais le business du transfert d’argent est parmi les plus florissants dans toute la région du Maghreb. Etats et sociétés transferts y trouvent leurs comptes.
Les transferts vers le Maroc ont été estimés par la banque européenne à 3,4 millions d’euros dont 2,9 millions d’euros des pays de l’Europe pour 1.255 millions d’émigrés. Quant à l’Algérie le montant des transferts avoisine 1.547 millions d’euros pour 1.2 millions d’Algériens résidants à l’étranger.

Selon Mahmoud Ben Romdhane, économiste tunisien, « rapportés par tête d'habitant, les transferts de revenus effectués en Tunisie sont les plus importants du Maghreb, y compris le Maroc, pays réputé pour être l'un des plus importants bénéficiaires des transferts financiers de ses travailleurs résidents à l'étranger».

Un réducteur de pauvreté

Mais les envois de fonds n’en demeurent pas moins un phénomène d’envergure mondiale. Selon les chiffres de la banque mondiale, les envois de fonds aux pays en développement ont dépassé 157 milliards d’euros en 2007. Mais si l’on tient compte des envois non recensés qui transitent par des voies informelles, le montant réel est censé être bien plus important. Ne serait-ce que pour la région du Maghreb les transferts formels représentent plus du double de l’ensemble de l’aide au développement octroyée par les pays développés. Toujours selon les spécialistes de la banque mondiale « Les envois de fonds aboutissent fréquemment à un surcroît d'accumulation de capital humain, d'investissements et d'esprit d’entreprise ».
Avec un nombre de migrants approchant aujourd’hui les 200 millions à l’échelle mondiale, l’économiste en chef et premier vice-président de la Banque pour l’économie du développement, François Bourguignon, voit dans la productivité et les salaires de cette main-d’œuvre un « puissant outil de réduction de la pauvreté ». Les transferts d’argents au Maroc aident ainsi beaucoup de familles à dépasser le seuil de la pauvreté. En effet, une étude faite par le réseau FEMISE, un réseau méditerranéen d’instituts de recherches économiques démontre que le taux de la population qui a échappée à la pauvreté au Maroc grâce aux envois de fonds est de 19 à 23%.

Sollicitude

Pour ces raisons, les gouvernements du Maghreb font de tout leur mieux pour protéger cette manne qui renfloue les caisses de leurs Etats respectifs. Ceci se matérialise par une forte sollicitude de leur part à l'égard des communautés d’immigrés se trouvant dans les pays d’accueil. Le Maroc à titre d’exemple tient à ce que cette communauté soit représentée au parlement et les descendants d’immigrés marocains héritent automatiquement de la nationalité marocaine même née à l’étranger. La Tunisie ,quant à elle, entoure également ses ressortissants d’une attention particulière allant des facilités administratives aux émissions TV destinés à cette frange de la population en passant par les privilèges douaniers au retour définitif car leurs poches n’étant généralement pas vides , les immigrés investissent dans des microprojets dont le nombre était proche en Tunisie de 600 projets par an au cours des années 2002, 2003 et 2004, selon la rapport « Mouvements des personnes et des capitaux dans le bassin euro-méditerranéen et responsabilité sociale des acteurs». Ces projets ont contribué à créer 2000 emplois, représentant 2,5% de l'ensemble des emplois créés et 3% des investissements bruts réalisés dans le pays.

Fethi Djebali et Youad Ben Rejeb